mardi 2 février 2016

Sursis de 6 mois en vue pour les sacs plastique en France


Prévue au 1er janvier 2016, l'interdiction des sacs plastiques va être repoussée au 1er juillet 2016 pour permettre aux commerçants d'écouler leurs stocks.
En votant oui à l’interdiction des sacs plastiques pour 2016, dans le cadre de la loi biodiversité, les députés pensaient bien faire.
Mais c’était sans compter les effets pervers de cette décision, qui risque de détruire des emplois et de peser sur les entreprises de recyclage du plastique. La filière s’est en effet développée grâce à des petites entreprises, qui souffrent déjà depuis plusieurs mois en raison de la baisse des prix de pétrole.
En effet, la chute du prix du pétrole rend les tarifs du plastique recyclé peu attractif. Entre la collecte et le traitement, le recyclage a en effet un coût qui rend actuellement le plastique recyclé plus cher que le plastique vierge. Et le rétrécissement du marché imposé par l’interdiction des sacs risque de lui être fatal. D’autant que la loi prend les professionnels de court : commerçants et distributeurs de sacs plastiques ont des stocks à ne plus savoir qu’en faire. Les artisans sur les marchés par exemple achètent souvent pour deux ans de stock, pour avoir accès à des tarifs plus bas.
Une interdiction reportée de 6 mois
Selon nos informations, Bercy aurait été sensible à cet argument. Le cabinet d’Emmanuel Macron a donc décidé de décaler la mesure de 6 mois, en demandant que le décret d’application de la loi précise que les sacs plastiques de caisse ne seront pas interdits avant le 1er juillet 2016. Au ministère du Développement durable, à la manette sur le sujet puisqu’il s’agit de l’application de la loi sur la transition énergétique, on élude toutefois la question.
Pour les professionnels, le report est acquis, même s’il n’est pas perçu comme une victoire. « On va avoir 6 mois de sursis, mais ensuite on mettra en péril une filière de 3000 emplois » prévient Marc Madec, directeur développement durable à la fédération de la Plasturgie et des Composites.
La loi sur la transition énergétique se fixe comme objectif une hausse de 30 %, de 2010 à 2030, du rapport entre son produit intérieur brut et sa consommation intérieure de matières. Dans le même temps, elle vise à une diminution de la consommation intérieure de matières par habitant.
La bataille des microns
Dans ces conditions, les acteurs de la filière attendent avec hantise le décret d’application qui précisera quel sac peut ou non continuer ou non d’être commercialisé. Pour l’instant, le gouvernement prévoit d’autoriser exclusivement les sacs d’une grande contenance, et d’une épaisseur de 50 microns, là où les sacs de supermarchés à usage multiple font plutôt entre 25 et 30 microns aujourd’hui.
« C’est aberrant, on va faire grossir la taille des sacs alors que l’objectif de la loi est de réduire la consommation de matière » proteste encore M. Madec.
Des sacs compostables, mais non recyclables
D’autant que la loi prévoit pour l’instant d’autoriser en revanche totalement les sacs « compostables en compostage domestique et constitués, pour tout ou partie, de matières biosourcées, » appelés à remplacer les sacs plastiques fruits et légumes en janvier 2017.
Une phrase sibylline. Les sacs plastiques réalisés à partir de matière végétale peuvent en effet contenir jusqu’à 60 % de matière d’origine fossile, du moins jusqu’en 2017. Et de toute façon ils ne sont pas vraiment biodégradables dans un compost domestique, mais plutôt dans un compost industriel organisé. Pour cela, il faudrait qu’ils soient collectés dans des collectes spécifiques de matière organique, ce qui n’existe quasiment pas en France.
Ces sacs, qui risquent donc de proliférer à partir de janvier prochain, posent en revanche un problème à la filière de recyclage du plastique : ils doivent en effet être triés des sacs en pur plastique pour ne pas dégrader le résultat final. « La situation pose déjà problème dans les déchetteries, où les sacs poubelles sont séparés des déchets par tri optique. Mais le dispositif ne peut pas trier les sacs biosourcés, qui viennent contaminer le reste des sacs » précise Alfred Rosales de la Federec.
Une fois «contaminées », les balles de plastiques recyclées ne peuvent être réutilisées et sont donc incinérées. Une critique confirmée par Piotr Barczak, de l’ONG EEB à Bruxelles. « Il faut garder en tête que les sacs biosourcés ne se décomposent pas bien notamment en environnement marin. Il faut les collecter séparément, et ne pas les mélanger aux autres plastiques recyclés. » assure-t-il.
 CONTEXTE
La directive relative aux déchets révisée par l'Union comprend une hiérarchie des déchets contraignante qui définit des priorités en matière de traitement des déchets.
Cette hiérarchie promeut la prévention des déchets, suivie de la récupération, du recyclage et de la réutilisation. Les décharges ne peuvent être utilisées qu'en dernier ressort.
Pour se conformer à cette directive, les États membres de l'UE sont obligés de définir des plans d'action de gestion des déchets après avoir analysé leur situation actuelle en la matière.
Les pays devront également mettre en place des programmes de prévention des déchets d'ici fin 2013 dans le but de rompre le lien entre croissance économique et impacts sur l'environnement liés à la génération de déchets.
 LIENS EXTERNES
Commission européenne
ADEME
Plastic Marine Litter