mardi 4 février 2014

Pesticides : des médecins alertent le ministre de l’Écologie et l’Assemblée nationale




À l’occasion d’une journée « Pesticides : Santé et biodiversité », organisée à l’Assemblée nationale par les députés Sophie Errante, Gérard Bapt et Jean-Louis Roumegas, le Dr Pierre-Michel Perinaud, généraliste à Limoges, s’est fait le porte-parole de plus de 1 200 médecins signataires de l’alerte sur la dangerosité des pesticides,lancée par trois associations du Limousin, de Martinique et de Guadeloupe.
« Les liens entre l’exposition aux particules et les pathologies chroniques ne sont plus contestables. Or l’imprégnation de la population est générale. Et une quarantaine de pesticides en circulation en Europe ont un caractère de perturbateurs endocriniens », a-t-il argumenté, concluant que les connaissances sont suffisantes pour agir.

Pour une reconnaissance de maladies professionnelles

Les médecins signataires demandent la reconnaissance de nouveaux tableaux de maladies professionnelles agricoles en lien avec les pesticides, la fin des dérogations à l’interdiction européenne des épandages aériens, notamment en Guadeloupe et en Martinique, où « l’exception est devenue la règle », selon le Dr Périnaud, l’interdiction des pesticides dans le cadre d’un usage non agricole, l’étiquetage des produits alimentaires, et la garantie que les autorisations de mises sur le marché sont délivrées par des laboratoires indépendants de l’industrie, choisis par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (ANSES).
Les médecins demandent en outre que l’Europe statue sur les perturbateurs endocriniens (PE), une démarche reportée fin 2013 sur fond de scandale, que les pesticides à caractère de PE soient retirés du marché et que l’agriculture biologique soit encouragée.
Plusieurs personnalités ont salué la démarche, comme le député Gérard Bapt, le Dr Laurent Chevallier, médecin nutritionniste attaché au CHR de Montpellier et le ministre de l’écologie Philippe Martin. Ce dernier a indiqué avoir apposé sa signature ce mercredi 29 janvier en bas de la loi interdisant les produits phytosanitaires dans les espaces publics à partir de 2020 et dans les jardins particuliers à compter de 2022, adoptée par le Parlement le 23 janvier.
Philippe Martin a aussi indiqué que le plan Éco-phyto serait revu en 2014, qu’une stratégie nationale sera élaborée en 2014 sur les PE et qu’un arrêté avait été signé en décembre dernier pour durcir les autorisations de dérogations dans l’épandage.

Des effets sanitaires documentés

L’alerte des médecins a aussi trouvé écho auprès des scientifiques. Sur la base de l’Étude environnement nutrition santé (ENNS) et du programme national de biosurveillance, Laurence Guldner, de l’Institut national de veille sanitaire (InVS), a confirmé que les pesticides sont omniprésents dans les organismes, y compris les organochlorés, pourtant interdits depuis des années. Les effets sanitaires ont été documentés dans une méta-analyse conduite par l’INSERM, qui montre un lien entre pesticides et maladies chroniques dans le cadre d’expositions professionnelles, et un «  grand nombre d’indices pour estimer "possible" l’impact de l’exposition aux pesticides sur le développement du fœtus et de l’enfant », selon la chercheuse Sylvaine Cordier.
De son côté, François Veillerette, porte-parole de Générations Futures a attiré l’attention sur une nouvelle étude de Gilles-Éric Séralini (non encore publiée) qui montre que 8 sur 9 pesticides formulés sont une centaine de fois plus toxiques que la matière active, sur laquelle repose pourtant l’évaluation des risques.
Coline Garré

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